Pour la veille comme pour les autres métiers, les outils choisis participent pour beaucoup à la qualité d’un produit ou d’une prestation.
C’est pourquoi il est essentiel de bien étudier les différentes possibilités offertes, mais aussi les besoins et les objectifs de votre stratégie de veille.
L’outil « magique » n’existe pas
Premier enseignement : il n’existe pas un outil qui permettrait à lui seul de surveiller tous les médias (presse, radio, internet…), toutes les sources (économiques, spécialisées…) et tous les contenus (tweets, billets, vidéos…), quels que soient le type de veille (technologique, concurrence, commerciale…).
Et je ne parle pas des outils d’analyse qualitative de contenus (pertinence, tonalité, etc.), encore approximatifs et souvent critiqués.
Si le sujet vous intéresse, je vous invite à lire le livre blanc de Visible Technologies sur le mythe de l’analyse sentimentale, ou encore le billet d’Actulligence sur la création d’indicateurs d’e-réputation contestables.
Pour une veille pertinente, il est donc nécessaire d’utiliser différents outils, adaptés à votre budget et à vos objectifs.
Une intervention humaine indispensable
Autre croyance, parfois véhiculée par les éditeurs : une fois paramétré, votre outil marchera « tout seul ». C’est bien entendu faux, pour plusieurs raisons :
- Le traitement des informations collectées est effectué par (au moins) un veilleur. Cette tâche prendra plus ou moins de temps selon les fonctionnalités proposées par la solution choisie ;
- Le paramétrage de l’outil met souvent plus de temps que prévu, sachant que cette étape est essentielle pour la mise en place d’une stratégie de veille efficace ;
- Il est primordial d’actualiser régulièrement le périmètre de votre veille, notamment les sources et les mots clés à surveiller et à exclure.
En somme, il est indispensable de disposer d’au moins une personne qui connaisse vos attentes, qui maîtrise votre outil et qui puisse, de façon autonome ou concertée, faire évoluer son paramétrage.
Se poser les bonnes questions
Alors comment faire ? Ne pas « mettre la charrue avant les bœufs », pour citer Stanislas Desjonqueres, dirigeant des Laboratoires Lyocentre, qui témoigne ici de son expérience à ce sujet.
L’offre actuelle d’outils de veille n’est pas parfaite, mais elle est multiple. Vous trouverez donc ceux qui vous conviennent en fonction de vos attentes, de votre budget et de votre cible.
Par conséquent, il est essentiel de bien réfléchir à vos besoins et à vos objectifs avant de vous lancer dans la course aux outils, sans quoi vous risquez d’investir dans une solution inadaptée, dont les résultats vous paraitront sans intérêt. Alors que la veille a un réel intérêt stratégique.
Alors comment faire ? Comme pour n’importe quel projet, il faut se poser les bonnes questions :
- Quels sont les sujets sensibles et à prioriser ? quelles sont les zones d’ombres ? (méconnaissance des concurrents, évolutions technologiques prises sur le tard…)
- Quels types de sources et de médias souhaitez-vous surveiller ? Quelle est votre cible ? (forums féminins, réseaux sociaux ciblés bancassurance… )
- Qui se chargera de piloter la cellule de veille ? De combien de temps disposeront cette/ces personne(s) ? (mutation interne, création de poste à plein temps, prestataire externe…)
- Quels sont les objectifs de votre stratégies de veille ? (identifier de nouvelles opportunités, mieux se positionner par rapport à un concurrent, évaluer son image sur internet…)
- Quels seront les destinataires des résultats de veille ? (direction générale, responsable marketing…)
- De quel budget disposez-vous ? (certains outils sont gratuits, pour d’autres la licence peut couter 100 000€)
Une fois toutes ces questions analysées, il est intéressant de mettre en place une phase pilote afin de compléter les différents points adoptés.
Sachez que quelle que soit la solution choisie, la veille est avant tout une démarche proactive qui ne cesse d’évoluer au fil du temps (outils, paramétrages, formation des personnes, développement interne…).
En complément je vous invite à lire :
– Définir ses objectifs de veille image en 14 questions, de Camille Alloing
– Veille stratégique et réglementaire : Un nouveau défi pour les banques, de Marc Barbezat
Frédéric Marin a commenté :
La mise en place d'une cellule de veille induit nécessairement le choix d'un ensemble de technologies ; dans ce cadre, il est indispensable de distinguer celles qui instrumentent la cellule de veille de celles qui sont mises à disposition des usagers de cette veille, en mettant en oeuvre un véritable confinement des premières, qui peuvent se montrer d'une grande complexité, alors que les secondes doivent garantir un usage, c'est à dire doivent être à la fois utilisables et intuitives.
Il faut bien entendu, et j'en suis d'accord, privilégier l'humain à la technique ! mais une des questions essentielles à se poser est bien celle concernant les usages et leurs évolutions : comment faire en sorte que l'information soit distribuée, enrichie, partagée, mise enfin au centre des préoccupations de l'ensemble des usagers ...
Frédéric Marin - alfeo.org
Marie a commenté :
@Frédéric Marin
Merci pour ce commentaire !
Il est effectivement important de se poser la question des usages et de leurs évolutions au sein de l'entreprise au moment de choisir ses outils de collecte, de traitement et de diffusion de l'info.
Dans ce billet, je réagissais davantage à l'idée fausse qu'un seul outil peut suffire pour mettre en place une veille pertinente. Elle est à mon avis due aux éditeurs qui prêchent pour leur paroisse, et par les entreprises, qui cherchent à limiter les coûts ou qui pensent que l'outil magique existe.
C'est une image un peu caricaturale, mais elle reflète aussi une certaine réalité à laquelle j'ai déjà été confrontée ;)
Frédéric Marin a commenté :
C'est effectivement une réalité commerciale qui présente le grand défaut de ne pas séparer les environnements de la structure de veille de ceux des usagers de la veille ... les premiers peuvent intégrer des technologies complexes d'analyse et de corrélation, alors que les seconds nécessitent une très grande "utilisabilité". L'absence de confinement de l'environnement technologique de veille peut induire des confusions tout à fait fâcheuses.
Par exemple, utilisant des techniques de cartographie en m'appuyant sur des travaux récents de structuration du web, je n'ai pu empêcher des "fuites" de se produire lors d'une étude récente : cela n'a pas manqué, nous nous sommes fait accuser de "charlatanisme technologique" ...
Frédéric Marin - alfeo.org
Amalbel a commenté :
Bonjour Marie et merci pour votre billet,
Je suis tout à fait d'accord avec vous sur l'apport indispensable de l'humain (veilleur, analyste...) pour un outil de veille. D'ailleurs, j'y ai consacré un billet sur mon blog que je vous invite à lire à cette adresse: http://tinyurl.com/24d5yxv
A mon sens, les éditeurs de logiciels de veille ont l'obligation d'informer leurs clients sur les forces et les faiblesses de l'outil et participer à sensibiliser sur l'importance de créer une cellule de veille au sein de l'entreprise pour permettre non seulement à un projet d'atteindre ses objectifs mais surtout de vulgariser ce métier (de veilleur...) au sein des entreprises et des directions métiers.
A très bientôt,
Amal
Gregory Culpin a commenté :
Attention au fait que l'on entend souvent par "outil de veille", un outil de collecte automatique d'informations... mais la veille n'est-elle pas avant tout un processus et un travail collaboratif dans lequel d'autres collaborateurs que le veilleur seul pourraient/devraient être impliqués?
Si la veille commence effectivement par une bonne définition en amont de ses objectifs, de ses sources, etc. elle se traduit aussi par une bonne gestion en aval des informations importantes capturées, par une bonne communication interne de celles-ci et par un accès efficace aux nouvelles connaissances qu'elle génère, et par les échanges et conversations qu'elle peut générer en interne pour aboutir à des actions concrètes.
En somme ce processus de veille relève autant d'un processus d'écoute à l'extérieur (voire l'intérieur) qu'un travail collaboratif réalisé par bien plus de collaborateurs que juste le veilleur – même si celui-ci garde la main sur les compétences de sélection et d'interprétation qui le caractérisent.
Aujourd'hui plusieurs consultants m'ont remonté le fait qu'ils ont commencé à aborder leurs projets de veille sous l'angle d'une bonne organisation des connaissances, leur fluidification, avant d'aborder la question de surveillance de sources – et que cela s'avère très efficace surtout dans une plus petite structure (PME). Les plus grandes structures sont quant à elle généralement déjà équipées d'outil de capture, moins de solutions d'échanges et de partage de veille collaborative en aval.
Merci en tout cas pour ce billet intéressant et qu'il et toujours bon de lire!
Gregory,
Knowledge Plaza
Marie Armand a commenté :
Bonjour Grégory,
Vous mettez le doigt sur une réalité : on comprend souvent "collecte" lorsqu'on parle de veille, alors qu'elle couvre des domaines plus larges, qui touchent ceux que vous citez (partage, qualification, analyse, etc.)
Cependant, les outils de veille s'arrêtent selon moi aux outils collaboratifs, qui prennent le relai : la veille alimente en informations stratégiques, qui doivent être ensuite "digérées" par d'autres outils et process comme ceux que vous proposez.
Mais sans ces outils, la veille perd de son envergure : elle doit être utile et informer la bonne personne au bon moment, d'où l'importance de la gestion des informations et des connaissances.
Ce billet était plutôt orienté sur la phase "amont" du processus de veille, mais l'aval de la veille (ce qu'on en fait) est tout aussi important.
Merci pour ce commentaire et à bientôt j'espère !
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