La veille comme beaucoup de métiers a son lot d’idées reçues. Et du fait d’être peu connu, le métier de veilleur est mal connu.
En caricaturant un peu, le veilleur est souvent vu comme une sorte d’espion omniscient, qui détient des outils magiques capables de tout faire ou presque.
Je vous propose aujourd’hui une petite compilation des trois principales idées reçues sur la veille et ses veilleurs… et de briser certains rêves (dès le lundi, c’est dur, je sais ;)
Un veilleur ne peut pas tout surveiller
Je l’avoue, c’est un peut de notre faute à « nous » prestataires : nous avons tendance dans notre discours à parler de « tout savoir sur… » ou « surveiller toutes les retombées à propos de… ». Et c’est malheureusement impossible dans la grande majorité des cas.
Pourquoi ? Tout d’abord parce-que certains sujets sont trop vastes : tout connaître, par exemple, du tourisme en Normandie relève du défi, car entrer une requête « tourisme » et « Normandie » n’est pas suffisant pour être (bien) informé à ce sujet, loin de là.
Alors comment faire une veille pertinente sur cette thématique ? J’en avais parlé dans un précédent billet sur la définition des axes de veille : la phase de réflexion en amont est essentielle car elle permet d’identifier quels sont les sujets à prioriser, les informations qui seront utiles et utilisées, les personnes qui les recevront, etc. mais aussi de définir des objectifs précis (le « retour sur objectif » plutôt que le retour sur investissement).
Une fois ces axes définis, on peut réfléchir sur une méthode et des outils à mettre en œuvre, ou en d’autres mots : en premier lieu identifier ce qu’on cherche et pour qui/pourquoi, et ensuite comment.
Pour reprendre le cas du tourisme en Normandie, après avoir réfléchi sur les objectifs à atteindre, on pourrait identifier des axes de veille prioritaires, par exemple des lieux touristiques, plutôt que de surveiller la Normandie en général.
L’autre raison pour laquelle on ne peut pas tout surveiller est que les outils de veille sont imparfaits : même les meilleurs peuvent passer à côté de certaines occurrences. Sans parler du traitement humain (obligatoire) qui n’est pas sans faille. On peut par exemple retirer un mot d’une requête et se tromper. Car le paramétrage d’une veille n’est pas immuable, il est mouvant : il est essentiel de faire régulièrement le point pour affiner ou élargir la recherche en fonction des besoins, du contexte, de l’actualité, etc.
Un veilleur ne sait pas tout sur tout
Après presque huit ans passés dans les métiers de la veille, c’est je crois la phrase que j’ai le plus couramment entendue (avec « mais tu es espionne en fait ? ») : « toi qui fait de la veille, tu devrais bien savoir que… »
Et bien non ! Le veilleur ne sait pas tout sur tout, et encore moins sur des sujets qu’il ne surveille pas. Il est plus connecté, plus à l’écoute de l’actualité que d’autres, mais la différence s’arrête là.
Dans le cadre professionnel, c’est plus ou moins la même chose et pourtant le transfert du savoir du client sur son métier, son environnement, son fonctionnement, ses attentes est essentiel. Sur une thématique aussi connue que le tourisme ou les RH, le besoin en information stratégique variera selon les structures et leurs attentes.
On pense souvent à tort que le veilleur saura se mouler tout seul aux besoins du destinataire final. Ce n’est pas totalement faux, car le veilleur est par définition curieux et ira s’informer tout seul. Mais certaines nuances, spécificités ou tout simplement la façon d’appréhender le sujet ne sera pas la même d’une personne à une autre.
Pourtant, cette phase de prise de contact et d’apprentissage avec le client/destinataire final est parfois difficile à mettre en place. D’une part parce-qu’on pense qu’un vrai bon veilleur saura se débrouiller tout seul, mais aussi parce-qu’on touche a des points sensibles et stratégiques. Ceci dit, les clauses de confidentialité sont faites pour ça, et puis le veilleur fera son boulot d’enquêteur et de « prise de température » pour pouvoir travailler avec toutes les cartes en main (ou le livrable final risque d’être erroné).
L’outil magique n’existe pas
C’est un de mes chevaux de bataille, j’avais d’ailleurs écrit un billet à ce sujet.
Il existe une multitude d’outils efficaces gratuits ou payants. Plus on se dirige vers une solution peu onéreuse, plus il faudra user d’ingéniosité pour ne pas perdre du temps et ne pas passer à côté de l’essentiel.
A l’inverse, plus les outils sont chers, plus ils sont complets et autonomes. Mais pour autant aucun à ma connaissance ne donne de résultats parfaits, et encore moins sans intervention humaine. Le veilleur intervient à tous les niveaux, et de façon itérative : en amont pour le paramétrage, pendant pour le tri, et en sortie pour la qualification et l’analyse des infos sélectionnées.
Aucun outil, même les plus perfectionnés, ne sauraient à mon sens remplacer ce rôle du veilleur, qui en plus aura en tête les attentes et les besoins des personnes qui recevront ces infos.
Et je ne parle pas ici des outils de « sentiment analysis »…
Une dernière chose à ce sujet, que j’évoquais dans le premier point : la questions des outils ne vient pas en premier lieu, mais plutôt en fin de boucle. Si on devait schématiser la réflexion à mener lors d’un projet de veille ce serait :
Et vous, quelles sont vos idées reçues (ou celles que vous recevez ;) sur la veille ?
Terry a commenté :
Pour moi, la veille est une pratique fondamentale que tous entreprises doit prendre en compte et intégrer à ces process afin de suivre l'évolution de son marché (mais pas que !!!). A défaut de ne pouvoir prendre un veilleur, il me semble indispensable que les collaborateurs se réservent un temps afin de faire de la veille pour l'entreprise qui serait par la suite mis en commun via un outil quelconque.
Mathilde a commenté :
J'ai souri en lisant : « toi qui fait de la veille, tu devrais bien savoir que… » !! Je l'entends aussi régulièrement...
Je crois que les veilleurs doivent surtout mettre en avant leurs qualités humaines : rigueur, sens du service, persévérance, discrétion, curiosité, sens de l'organisation et puis nos capacités d'analyse, de synthèse et de communication des résultats de nos trouvailles qui font toute la différence avec les outils les plus chers du monde.
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