Comme pour tout projet, la mise en place de stratégie(s) de veille suppose de faire le point et de se poser les bonnes questions.
Ces étapes préalables sont essentielles puisqu’elles permettent d’identifier les axes de veille, et de les adapter aux besoins et au fonctionnement de l’entreprise.
1) Evaluer ses points forts, ses points faibles
Objectif : connaître les forces et les faiblesses de son entreprise.
Cette première étape, basée sur une introspection de l’entreprise, permet de définir en partie les axes de veille à approfondir.
Voici des pistes de réflexion :
- Le patrimoine immatériel (marques, brevets) est-il protégé ?
- Les responsables internes sont-ils informés au bon moment ?
- Quelle est la capacité de l’entreprise à anticiper, à innover ?
2) Identifier les sujets sensibles
Objectif : connaître les points névralgiques de votre activité.
A la différence de la précédente étape, celle-ci se base davantage sur un diagnostic du marché plutôt que de l’entreprise (menaces, opportunités).
Voici des pistes de réflexion :
- Quelles sont les données conjoncturelles et sociétales qui influent sur une activité donnée ?
- Quelle est l’évolution actuelle de la réglementation ?
- Quelle est la santé financière des clients, des fournisseurs ?
Parmi les méthodes les plus connues, la matrice SWOT permet de faire un bilan complet sur ses forces, faiblesses, menaces et opportunités (points 1 et 2).
3) Utiliser les informations disponibles en interne
Objectif : capitaliser sur l’existant, pour compléter ensuite vos besoins en information.
Chaque employé, chaque collaborateur est potentiellement un informateur et détenteur d’informations précieuses pour l’entreprise. L’essentiel étant d’identifier les relais internes, et de favoriser le partage et la collaboration.
Voici des pistes de réflexion :
- Les commerciaux font-ils remonter les informations qu’ils collectent sur le terrain ?
- Les experts s’informent-ils par eux-mêmes des évolutions du marché ?
- Les responsables internes surveillent-ils déjà leurs concurrents ?
4) Définir ses objectifs stratégiques
Objectif : la vocation première de la veille est de faciliter et d’étayer la prise de décision.
Pour répondre aux questions préalables à tous choix stratégique, il est essentiel de bien exposer sa vision à court, moyen et long terme.
Voici des pistes de réflexion, par exemple pour le lancement d’un produit :
- Quel est mon positionnement par rapport à mon concurrent Y sur le marché Z ?
- Quelles sont les attentes et les habitudes des consommateurs concernant tel ou tel produit ?
- Suis-je en conformité avec la réglementation en vigueur ?
5) Identifier les destinataires
Objectif : identifier les personnes qui doivent être alimentées en informations stratégiques.
Une veille efficace fournit la bonne information au bon moment à la bonne personne. Il est donc essentiel de connaître les besoins de chacun et d’adapter sa veille en conséquence.
Voici des pistes de réflexion :
- Qui doit être informé en priorité des dépôts de brevets ?
- Les responsables commerciaux connaissent-ils bien la concurrence ?
- La direction générale dispose-t-elle des informations nécessaires (ni trop, ni trop peu) ?
6) Définir précisément le ciblage
Objectif : délimiter le périmètre de sa veille et améliorer sa pertinence.
Il s’agit ici de définir précisément son besoin (thématiques, sources, mots clés…), en se basant notamment sur les enseignements tirés des questions précédentes.
Voici des pistes de réflexion :
- Quelles sont les sources ou les groupes de sources à surveiller ? (par ex. presse spécialisée, régionale)
- Quels sont les thématiques et mots clés à inclure ou à exclure ? (par ex. surveiller « veille » sans « écran de veille »)
- Quelle est la zone géographique à privilégier ?
7) Préciser les formats et pré-requis à respecter
Objectif : identifier les besoins et habitudes, pour adapter sa veille à son fonctionnement.
En d’autres mots, cette étape permet de préciser les outils dont l’utilisation est répandue dans l’entreprise, de détailler les méthodes d’organisation et de classement des documents, ou tout simplement de connaître les habitudes de lecture des destinataires des résultats de veille.
Voici des pistes de réflexion :
- Faut-il privilégier des fiches synthétiques, ou des analyses graphiques ?
- Quel est le volume idéal d’informations ? Sa périodicité ?
- Quels sont les critères de classification et d’organisation des documents (confidentialité, urgence…) ?
8) Assigner un budget
Objectif : définir une fourchette budgétaire pour ajuster sa stratégie de veille.
Cette étape permet d’évaluer le coût humain (temps passé) et matériel (outils), et d’opter pour une solution ou une autre en fonction de son budget. Dans le cas d’un budget réduit, des axes de veille peuvent être priorisés par rapport à d’autres, et les outils gratuits privilégiés.
Voici des pistes de réflexion :
- Quelle est la part du traitement humain en termes de temps ? (collecte, analyse, diffusion)
- Quel est le budget accordé aux solutions de veille ?
- Faut-il former le personnel aux outils de veille ?
9) Choisir ses outils
Objectif : opter pour la solution la plus adaptée à son budget et à ses besoins.
Il s’agit ici de tester différentes offres d’outils et de prestations, et de choisir en fonction du budget précédemment défini mais aussi du niveau d’expertise et d’autonomie en termes de veille. Toutes les options sont possibles : en interne, externe ou les deux.
Voici des pistes de réflexion:
- Quels sont les outils gratuits vraiment efficaces et pertinents ?
- Faut-il choisir un prestataire pour la collecte d’informations ?
- Si le budget le permet, quelle solution choisir pour la diffusion et le partage d’information ?
10) Evaluer l’impact de sa stratégie de veille
Objectif : identifier des indicateurs pour mesurer son efficacité.
Même s’il est difficile de calculer précisément le retour sur investissement (ROI) d’une stratégie de veille, certains critères peuvent mettre en valeur ses points positifs et négatifs. Il est notamment intéressant de refaire le point sur les forces, faiblesses, menaces et opportunités précédemment évoquées.
Voici des pistes de réflexion :
- Ma marque et mon savoir-faire ont-ils été préservés grâce à la veille technologique ?
- Mes faiblesses définies précédemment ont-elles été amoindries ?
- Les responsable internes se considèrent-ils mieux informés ?
En conclusion : faites régulièrement le point…
- Votre entreprise est en perpétuel mouvement, vos objectifs, vos forces et vos faiblesses évoluent avec elle.
N’hésitez pas à faire régulièrement le point sur les différentes questions abordées ci-dessus : quels sont vos nouveaux objectifs ? Les formats proposés vous conviennent-ils vraiment ? Le budget alloué est-il trop élevé ou à l’inverse insuffisant ? - La veille est elle aussi en évolution constante : les outils et les méthodes de veille se renouvellent sans cesse.
N’hésitez pas à tester régulièrement de nouvelles solutions, et à les comparer à celles que vous avez choisi, qu’il s’agisse d’outils en interne ou de prestataires de services. - Et n’oubliez pas : comme tout projet, la phase de préparation et de définition des objectifs est indispensable à la réussite de votre stratégie de veille.
En sautant des étapes, vous risquez de passer à côté de l’essentiel, et de faire perdre à la veille son aspect éminemment stratégique.
Aref a commenté :
Synthèse intéressante Marie. Toutefois, le point 4 n'est-il pas le plus important, et donc celui qui conditionne le reste. La veille étant une activité de support, c'est la stratégie d'entreprise qui "dictera" les orientations de la veille, et pas l'inverse (en tout cas dans un premier temps, lors du lancement).
Marie a commenté :
@Aref
Bonjour Aref,
Merci pour ce commentaire !
J'ai tenté dans ce billet de proposer une vision assez globale des points à aborder pour définir les axes de veille et leur ciblage.
Le point 4 est effectivement important, car c'est en somme la finalité de la veille : appuyer les décisions stratégiques.
Ceci dit, je l'ai proposé ici comme un des piliers dans la définition d'une stratégie de veille. En fonction des points forts et des points faibles d'une entreprise (par exemple son manque d'anticipation technologique), on va pouvoir déceler un axe de veille (surveiller les dépôts de brevets) et appuyer par là-même des décisions stratégiques sur ce point précis.
L'inverse est possible : l'entreprise Y souhaite palier à la hausse du prix de telle matière première et rechercher un composant moins coûteux, et va donc mettre en place une veille technologique (la vision à moyen terme défini l'axe de veille).
L'essentiel ici étant de poser les jalons avant la mise en place d'une stratégie de veille.
Qu'en penses-tu ?
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